Configurations
Hadassa Ngamba (République Démocratique du Congo)
2019
Configurations est un projet de recherche que Hadassa Ngamba a entamé via l’analyse de la cartographie du Congo perçue comme la résultante des conquêtes coloniales des terres et plaques lithosphériques en Afrique centrale. La cartographie est ainsi envisagée en tant que métaphore propice à disséquer les configurations du Congo inventées et standardisées par des fantasmes modernes. Pour ce faire, Ngamba a effectué une forme d’enquête à travers la province du Kongo Central, au cours de laquelle elle a collecté un grand nombre d’informations l’amenant à conclure qu’à l’époque coloniale, le Congo avait été construit comme une vaste usine de production aux produits destinés à l’exportation. Dans le cas du Kongo Central, la production porte sur l’énergie via le barrage d’Inga notamment. Sur une toile, l’artiste a utilisé et démultiplié le logo de l’entreprise qui exploite ce dernier, en le peignant des différents couleurs des drapeaux du Congo depuis l’indépendance jusqu’à aujourd’hui. Dans son ultime réinterprétation, le rouge et le noir du logo, témoignent des espoirs de Ngamba malgré le chaos qui règne dans son pays. Configurations se décline par ailleurs sous de multiples médiums :cartes, toiles, installation, mixage sonore expérimental, tronc de bois rouge et photographie notamment.
Née en 1993 à Kizu dans la province du Kongo-Central, Hadassa Ngamba est une plasticienne congolaise qui vit à Lubumbashi et travaille entre le Katanga et le Kongo-Central. Elle a fait ses études à l’Université de Lubumbashi à la faculté de criminologie. Elle a exposé ses premières œuvres en tant qu’artiste lors de la 5ème Biennale de Lubumbashi en 2017, après un atelier pédagogique animé par Toma Muteba Luntumbue, Sammy Baloji, Sandrine Colard et Yves Robert.
Pendant son enfance, elle a vécu dans un environnement empreint de souvenirs coloniaux et de la genèse de l’indépendance du Congo (Boma). Témoin et co-victime des abus masculins portés sur sa mère, elle se met à la recherche de réponses personnelles et collectives aux questions liées à la mémoire coloniale de son pays et à l’équilibre du pouvoir. Dans son travail, elle tente de redéfinir les stéréotypes fallacieux liés à l’identité ancrée dans le temps et dans l’espace de la société congolaise.
Le travail de Hadassa Ngamba est constitué des techniques du stylisme et de la coiffure, du dessin, de la peinture, de la photographie, de la vidéo et de la performance. Dans sa pratique, elle utilise le wax comme un dispositif de langage généalogique de la mémoire coloniale conceptuelle et la malachite comme élément de questionnement sur l’économie du Congo à travers le Katanga, la région où elle vit actuellement.
Considérant son histoire personnelle comme point de départ pour aborder celle du Congo, le travail de Hadassa Ngamba s’inscrit dans la reconfiguration du routeur colonialiste installé dans l’histoire de son pays, en perturbant les protocoles de celui-ci, et une régénération de l’autonomie du pouvoir dialectique.
Hadassa Ngamba était artiste en résidence au Centre d’art contemporain WIELS à Bruxelles, de janvier à mars 2019. Elle est Lauréate de la session Lubumbashi 2019 du Prix Laurent Moonens et son oeuvre a été réalisée avec le soutien de la Fondation MOONENS. Sa participation à la biennale est soutenue par Wallonie-Bruxelles International.
Texte: David Shongo
Crédit photo: Musa Musa