Congo Coin
Naufrage
Jean Katambayi (République Démocratique du Congo)
2019
Congo coin est une pièce de monnaie d’1m80 de diamètre à l’effigie d’une sirène qu’a imaginé Jean Katambayi pour la RDC. Cette nation qui pourvoit le monde entier en minerais dont sont extraits les métaux, ne fabrique en effet pas de pièces de monnaie et le franc congolais se décline uniquement sous forme de billets. Congo coin matérialise dès lors un des nombreux paradoxes de la réalité économico-politique congolaise qui questionnent l’artiste. Non sans ironie, ce dernier souligne que le Cap Vert au sous-sol dépourvu de minerais émet des pièces de monnaie, alors que le Congo qui en est si richement pourvu, n’en met aucune en circulation.
L’installation Naufrage reproduit un poste de télévision en forme de canot de sauvetage et truffé d’objets que Jean Katambayi a notamment ramené de ses voyages. Ces objets font écho à ceux qu’emportent avec eux les migrants lors de leur traversée de la mer Méditerranée et qui, en cas de naufrage, sont retrouvés flottant à la surface de l’eau. Naufrage des migrants en route vers l’El Dorado du Nord mais naufrage du Nord également, qui s’avère incapable de réguler et d’équilibrer ces déplacements d’humains dans un monde qui n’est qu’une suite de migrations.
Jean Katambayi Mukendi est un artiste qui vit à Lubumbashi, une ville considérée comme la capitale du cuivre. Le cuivre étant l’un des minerais qui constituent la géologie de son Pays. Né de parents ayant travaillé pour la société minière, il a réalisé plusieurs interventions de décoration et de bricolage en famille qui lui ouvriront la voie à la pratique artistique en plus de sa prédisposition naturelle à la créativité.
Depuis son enfance, Jean se préoccupe de l’avenir de la société dans laquelle il vit, basé sur le paternalisme colonial. Une société qui courrait le danger de ne pas pouvoir capitaliser ses acquis, ce qui est malheureusement la situation actuelle. En guise de réponse à son inquiétude, Jean a recouru à une approche de résistance en fabricant des machines imaginaires à l’aide de cartons emballage de fournitures de bureau, que sa mère ramenait des bureaux, et grâce à son talent de technicien qui lui a été transmis par son père. Les cartons servaient à la famille de sous-lit, de lit ou encore de plafond. Jean a ainsi transformé le « contenant » en « contenu » qu’il exportera plus tard vers la provenance, Le Nord.
Jean a fait des études techniques et les Arts et Métiers, avant de faire des études de Mathématiques, alors que ses frères et sa sœur se sont intéressés aux études d’ingénieur. On note que Jean a fait des études pour se positionner lors de la forte crise économique qui a secoué son pays. Jean fut un mauvais apprenant à l’école, simplement car son temps de création était important depuis son enfance, avec un point culminant à l’adolescence.
Pour toucher la sphère de la création, Jean recoure aux axes de temps, d’énergie et d’espace. Sa démarche vise à aborder la transformation de manière universelle pour aligner le Sud et le Nord.
Jean a participé à quelques biennales, à plusieurs expositions dans le monde et à plusieurs résidences d’artistes dont la plus importante pour lui était la résidence à l’Ecole supérieure d’Art d’Aix-en-Provence. Il est représenté par Trampoline Gallery à Anvers. Ses œuvres sont dans les collection du MUHKA à Anvers et du Mu.ZEE à Ostende. Il est également l’un des contributeurs du projet de recherche On-Trade-Off, initié par Picha et Enough Room for Space.
Jean projette des projets futurs pour sa carrière. Pour rendre son œuvre à la société, il improvise quelques échanges inédits en politique et en économie, une performance pour indirectement parler de son travail et une manière de faire participer le grand public à penser autrement la société.